Voyage vers l'Est (1)

La première nuit à la belle étoile s'était bien déroulé pour tout le monde, sauf peut-être pour le lièvre Jeannot Longuepatte de Fifrelet, qui s'était plaint durant tout le début de la nuit qu'il allait bientôt mourir de faim si on ne cuisinait pas quelque chose d'autre que le pain et le fromage qui avait été servi au repas du soir. Coupécor avait d'ailleurs déclamé d'un air désespéré que aucun lièvre n'aurait du venir, parce qu'un fois qu'il aurait péché ses poissons, il tenait à en garder quelques uns intacts jusqu'à Rougemuraille.

Le matin venu, les voyageurs reprirent leur route.
- Nous serons dès ce soir au ruisseau Sud, dit Dugudule. Des musaraignes à moi nous y attendent avec assez de bateaux pour tout le monde.

Grataterre se réveilla à l'aube, à cause des bruits venant du camp des "grands". Prudemment, elle attrapa Picfrap par la peau du ventre, un des seuls endroits de son corps qui n'était pas couvert de piquants acérés, et le secoua tout en lui mettant sa grosse patte sur la bouche pour qu'il ne fasse pas de bruit.

-'S-qu'y a? demanda le hérisson une fois éveillé.
-Rren d'autrre qu'si tu voulions manger, y t'faut t'rréveiller.

La petite taupe fourra une flasque vide dans les pattes de son ami.

-Y a un risseau point loin, alorrs toé, t'allions nous cherrcher d'l'ieau pendant qu'j'préparrions à manger.

Sans discuter, parce qu'il n'était pas assez alerte pour parlementer avec une taupe, le petit hérisson alla prendre de l'eau dans le ruisseau. Lorsqu'il revint, sa camarade avait coupé en deux un petit pain bourré de confiture et de noisettes moulues. Une fois leur repas terminé les deux Bout-d'Chous prirent leurs sacs et se raprpochèrent le plus silencieusement possible du camp des adultes. Ces derniers étaient sur le départ, et Grataterre comme Picfrap entendirent distinctement la remarque du Dugudule.

Tandis qu'ils se mettaient en marche, la petite taupe glissa à son ami:

-J'aimions point ça, c't'histoaire d'ieau, mais c'étions ben sûrr qu'si on voulions pas s'fairre s'mer, n's allions dvoairre monter dans ce bouts d'bois avant les autrres. Pourr sûrr...
-Pff, fit Picfrap. Qu'est-ce tu veux qu'j'fasse? Pour sûr, j'connais pas le ch'min, moi...

Un peu inquiets, les deux petits accélérèrent le pas, de façon à se retrouver près de la tête de la colonne.

Après une bonne nuit de sommeil passée à la belle étoile, Martin se réveilla dans le chant des oiseaux. La brume recouvrait la cime des arbres les plus proches, et la rivière clapotait autour des troncs d'arbres creux, déjà installés sur le cours d'eau.
Le guerrier se leva et inspira un peu d'air frais, puis il se dirigea vers Dugudule, qui était déjà réveillé. La musaraigne petit-déjeunait des reliefs du repas de la veille au soir. Martin prit un scone au miel et le passa au-dessus des cendres d'un feu afin de le réchauffer un peu, puis mordit à pleines dents dans le petit gâteau.

- Je crois que nous ne sommes pas prêt de partir à l'aube si tout ce petit monde continue à ronfler ainsi pendant deux heures, dit Dugudule en montrant les dormeurs couchés ça et là sur le sol.
La musaraigne se leva et cria:
- Debout!
Voyant que cela n'avait pas d'autre effet que de faire fuir un grillon qui n'avait rien demandé, il donna quelques coups de pieds dans les couvertures, et bientôt tout le monde fut réveillé.

Une fois que chacun eut repris ses esprits et mangé de quoi tenir jusqu'au repas de midi, Martin déclara:
- Bien, nous pouvons embarquer, je crois.

Alors que les voyageurs allaient monter sur les bateaux, Piccolo arriva à tire-d'aile.
- Que se passe-t-il? s'inquiéta Martin. Un problème à l'abbaye?
- Aheum, non, rien de grave, mais il se trouve qu'un blaireau du patronyme d'Anselme a décidé de vous accompagner dans votre quête, et que, aheum, je devais vous en informer afin que vous l'attendiez.

Martin se tourna vers Dugudule et lui demanda:
- Pouvons-nous encore attendre?
Le chef musaraigne lui fit un signe de tête affirmatif, et Martin répondit à Piccolo:
- Bon, eh bien vous pouvez dire à ce blaireau que nous l'attendons.

L'oiseau repartit.

Epuisé par son voyage à vive allure, et de plus avec quelques unes de ses blessures encore ouvertes, Anselme s'approcha d'un pas chancelant de la rive. Entassés sur des troncs d'arbres creusés se tenaient les musaraignes de l'Ugmuray, qu'Anselme avait déjà rencontré au cours de ses périgrinations. Il y avait aussi deux jeunes, un hérisson et une taupe, ainsi qu'un écureuil dodu, trois lièvres dégigandés, et... une souris à l'air aussi féroce qu'un seigneur blaireau, portant une merveilleuse lame à sa ceinture. Le vagabond s'approcha et les salua :

"Bonjour, je me nomme Anselme et je viens du Sud. Une bande de charognards que je pourchassais m'a conduit devant votre abbaye, et l'on m'a dit que vous apprêtiez à partir en exploration. Je sollicite l'autorisation de vous accompagner."

[En fait je crois que Grataterre et Picfrap se sont cachés dans un bateau]

Un jour et une nuit après que Piccolo les ait prévenus, Anselme arriva à proximité de la rivière. L'aube se levait justement, et ainsi le voyage ne ferait qu'être décalé d'un jour.
Le blaireau les salua:

- Bonjour, je me nomme Anselme et je viens du Sud. Une bande de charognards que je pourchassais m'a conduit devant votre abbaye, et l'on m'a dit que vous apprêtiez à partir en exploration. Je sollicite l'autorisation de vous accompagner.
- Bonjour Anselme! s'exclama Dugudule, qui connaissait apparemment déjà le vagabond.
- Bienvenue à vous, renchérit Martin, Piccolo nous a prévenu de votre arrivée, nous vous attendions. On a fait de la place sur les bateaux afin que vous puissiez avoir votre couchette. Car, bien entendu, vous pouvez nous accompagner.

S'en suivit une série de salutations et de présentations, jusqu'à ce que l'heure soit venue de grimper sur les bateaux.

[Ok. Au fait, il y a combien d'habitants de l'abbaye, de musaraignes et de troncs évidés ?]

Anselme avait rarement eu l'occasion de naviguer, préférant la plupart du temps voyager sur la terre ferme. Néanmoins il savait bien nager, et se débrouillait à la pagaie. Le blaireau monta dans une des embarcations, ou un espace imposant avait été fait pour qu'il puisse s'asseoir. Dugudule monta prestement sur un des troncs, mit ses mains en porte-voix et donna le signal du départ donna le signal du départ :

"Duugudududududuuuuuullle !!!"

Les musaraignes détachèrent les amarres de leurs embarcations, tirèrent leurs rames et se mirent à pagayer de bon coeur. Les bateaux des musaraignes étaient très confortables : le bois avait été tellement poli qu'il était parfaitement lisse, et une rangée de petites alcôves dans le bois permettaient de ranger le nécéssaire pour un long voyage. Saisissant une pagaie, le blaireau vagabond l'enfonça dans l'onde claire comme il voyait les musaraignes le faire. Avec sa force colossale, son bateau prit bientôt la tête de la colonne.

[Disons à peu près une dizaine de l'abbaye plus Picfrap et Grataterre, environ six bateau à une vingtaine de places (sauf dans le tien, car tu prends plus de place), dont cinq pour les voyageurs et un pour le gros matériel (les vivres, par exemple), alors à peu près 80 musaraignes.]

Martin grimpa dans un bateau, sur lequel se trouvaient déjà l'écureuil Coupécor ainsi que le lièvre Jeannot Longuepatte de Fifrelet. Ce dernier s'installa confortablement, ayant prévu une couverture pour, comme il le disait "protéger son humble derrière des méfaits du bois qui, comme chacun le sait, est fichtrement plein d'échardes".

- Duugudududududuuuuuullle !!!
Le cri des musaraignes retentit, et le voyage commenca.

Rapidement, Martin prit le rythme pour plonger ses rames au bon moment. Bien qu'ayant déjà ramé dans les bateaux des musaraignes, il devait à chaque fois reprendre l'habitude.
Anselme, lui, s'en donnait à coeur joie. D'un seul coup de pagaie, il pouvait à lui tout seul prendre presque autant d'avance que un autre bateau plein.
Sous le chaud soleil, les troncs d'arbres avançaient vers l'Est.

[Le prochain qui poste peut créer un nouveau topic dans la partie du Ruisseau Sud, que j'ai rajouté.]