Le voyage de Roussette partie 3, Hiver

Roussette marchait depuis deux heures environs lorsqu'elle atteignit un petit bois vers lequel elle n'était encore jamais passée. Elle n'avait pas envie de perdre du temps à le contourner alors que son but, l'océan, se trouvait aproximativement de l'autre côté bien qu'assez loin, aussi y pénétra-t-elle gaillardement. A peine eut-elle passé la lisière que les sons se firent plus éttouffés, comme chaque fois lorsqu'on pénétrait dans une forêt. Elle décida de se dégourdir un peu les pattes, et, en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, elle grimpa dans un arbre, un vieux pin que l'hiver avait épargné. Joyeuse, elle relâcha un peu son attention constante et elle se mit à sauter -on pourrait presque dire voler- d'une branche à l'autre.

Soudain, un léger et très discret craquement au-dessus de sa tête l'alerta, et elle continua son chemin, tout à coup beaucoup plus attentive aux bruits de ce petit bois. Roussette était une bonne combattante, à l'oreille attentive, à l'intelligence rapide, et ce fut ce qui la sauva ce jour-là. En effet, elle entendit soudain un bâton siffler dans l'air matinal, et, sans plus réfléchir, elle se laissa tomber jusqu'à une branche qui se trouvait trois mètres plus bas. Elle se rattrapa habilement, dégaina une de ses dagues effilées et la entre ses dents pour continuer de se déplacer à toute vitesse dans les sapins, les ifs et les pins dont les aiguilles lui cachaient ses ennemis.

- Tchakatchouk! Onlamanké! Courélaba! Yfolavoir, encerkléla, sinonpa miamiamctenui!Tchakatchouk!
- Oukilé, lékureuil, oukilé?
- Tchakatchouk! Lèdéssendu, yvatrèvit, vitsuivélesinon Sachvakorla pacontentpacontentpacontent!Tchakatchouk!

Tandis qu'elle filait à travers les arbres, Roussette Sansnid entendait ses mystérieux ennemis crier dans leur étrange dialogue. Elle aperçu un panache roux et eu peine à en croire ses yeux: des écureuils! Un instant déconcertée, elle remarqua au dernier moment l'animal qui se préparait à lui sauter dessus. Elle fit un bond magistral et se retrouva au-dessus de l'étrange bête, qu'elle aplatit sur sa branche. Le retournant, elle vit que c'était un rat, qui s'était peint le visage pour se cacher dans les branches des arbres et qui s'était attaché un faux panache pour faire croire qu'il était uun écureuil. Sans s'attarder plus longtemps, Roussette repris sa course folle à travers les arbres. En écoutant les paroles des rats arboricoles, elle devinait leurs manoeuvres et les faisait échouer les unes après les autres. Elle comprit bientôt que le chef, Schavaquelquechose, était celui qui finissait ses phrases par Tchakatchouk. Elle le repéra au son de sa voix et au moment où il s'approchait trop près d'elle, l'écureuil lui sauta dessus. Plaquant sa dague contre la gorge du rat en chef, elle s'exclama dans la langue des rats arboricoles:

-Tchakatchouk! Cémoiquidécidemaintenan vouvoupartépasksinon jelemangetoucruouentourte votrechef évoulreverrezplujamaisjamaisjamais! Tchakatchouk!
-Non, pamangé Shavakorla, pamangé, pamangé!
-Tchakatchouk! Sivouvoutaisépa jelemangetoutdesuitemoi votrechefimbécile! Tchakatchouk!

Roussette poursuvi son chemin sans encombre, le rat sur l'épaule. Arrivée à la lisière ouest du bois, elle cria:

- Tchakatchouk! Vouavédelachance jaipafaimpourlmoment jvoulaissevotrechefenvi laprochainefoikvousmembêté jvoumangetousunparunmiamiam! Tchakatchouk!

Laissant le chef des rats se masser la tête au bord du bois, elle repartit à un bon rythme vers l'ouest.

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